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♦ L’Algérie n’est plus « la chasse gardée » de la France depuis la chute de Bouteflika
La résolution d’«urgence » sur la situation des droits de l'homme en Algérie, adoptée par le Parlement européen le 26 Novembre, au-delà de son ingérence inacceptable confirme que l’Algérie n’est plus « la chasse gardée » de la France, depuis la chute de Abdelaziz Bouteflika. Autrement ses lobbies n’auraient pas eu recours à ce procédé pour souffler à des eurodéputés de pondre un chef d’œuvre d’injonctions à fort relent colonial, aussi bien dans la forme que dans le fond.
Quelque soit la politique suivie par le Gouvernement algérien et sa contestation par les citoyens et l’opposition, la construction d’un système démocratique reste une affaire interne, algéro-algérienne. Ce n’est pas seulement une question de « nif » ou d’honneur national, mais pour la simple raison qu’il ne peut y avoir de démocratie sans souveraineté et un pays sans souveraineté ne peut construire ni démocratie ni aucun projet économique et social pouvant garantir l’exercice des Libertés et des droits de ses citoyens.
Or, il y’a comme un jeu malsain chez les Gouvernements des pays dits développés dominants en ce concerne ces questions de démocratie et de droits de l’Homme. Ils empêchent par plusieurs voies légales ou détournées les pays sous-développés, anciennement colonisés, de décider de la gestion de leurs propres ressources pour leur développement et au profit de la majorité de leurs citoyens sous prétexte de libéralisme économique tout en dénonçant les atteintes aux droits de l’Homme.
Ils encouragent une « démocratie de façade » et une gouvernance mafieuse qui permettent le détournement des richesses de ces pays, mais en même temps ils envoient à leur trousse toute une multitude d’ONG financées par le multimilliardaire George Soros, le faiseur des « printemps arabe » pour faire tomber ces gouvernements autoritaires dès qu’ils s’éloignent des intérêts des pays occidentaux, de leurs oligarchies et multinationales. Ces ONG se révèlent alors comme des instruments de pression et de chantage pour que les pouvoirs autoritaires du Tiers monde restent dans le giron des plus puissants. Et la boucle est bouclée !
Après l’indépendance, l’Algérie est resté dans la « zone d’influence » française, comme le prévoyait l’ordre néo- colonial. Ce qui signifie que tous les pays occidentaux devaient se référer à l’avis de la France avant de prendre leurs décisions concernant leurs relations avec l’Algérie. Les études, les analyses, les rapports et recommandations officiels français devaient leur tenir de références. Même sur le plan médiatique, les médias officiels français, étaient et restent la référence pour les journalistes européens dans la couverture des évènements en Algérie.
Hormis Houari Boumediene qui a mené une politique souverainiste, les autres mandats présidentiels notamment ceux de Chadli Bendjedid et surtout Abdelaziz Bouteflika n’ont pas adopté une politique remettant en cause la position dominante des intérêts français. Au contraire ces deux présidents étaient proches de l’Elysée. Boumediene a mené une politique indépendante basée sur l’option socialiste dans un contexte mondial où les pays du « bloc de l’Est » (Russie, Yougoslavie) venaient en aide aux pays qui venaient de se libérer du colonialisme. Suite à la mort (suspecte) de Boumediene, son successeur Chadli va instaurer le libéralisme après les révoltes d’octobre 88, que certains observateurs ont qualifié de premier « Printemps arabe ». Bouteflika qui avait déjà ses entrées à l’Elysée lorsqu’il était Ministre des affaires étrangères, arrive, à la sortie d’une guerre contre le terrorisme, pour instaurer le néo libéralisme qui va faire saigner l’Algérie.
Durant les quatre quinquennats de Bouteflika qui allait plusieurs fois par an à Paris alors qu’il n’a jamais visité un pays africain, la France était privilégiée, ses entreprises favorisées dans les projets d’investissement et les oligarques algériens proches du clan présidentiel transféraient des sommes d’argent colossales, illégalement, pour investir dans l’immobilier et le commerce à Paris. Les lobbies français présents au sommet de l’Etat, des ministres, bi- nationaux corrompus comme Abdeslam Bouchouareb, sabotaient les projets avec les partenaires d’autres pays européens ou asiatiques pour les attribuer aux sociétés françaises. C’était la lune de miel entre Alger et Paris. C’est pourquoi durant les 20 ans de règne de Bouteflika, on a rarement entendu les critiques et les rapports concernant sa démocratie de façade installée par la corruption qui s’est répandu à tous les niveaux!
C’est ce qui explique le soutien apporté par Paris à tous les mandats de Bouteflika, y compris le cinquième mandat et la prolongation d’une année de transition du 4ème mandat, avant de changer de fusil d’épaule et de soutenir le Hirak qui a affirmé qu’il ne voulait « ni de Abdelaziz ni de Saïd ». Quand le Hirak s’est imposé et que l’armée a lâché Bouteflika et qu’elle ne voulait pas entendre d’un mandat par procuration pour son frère Saïd. Le scénario d’un fauteuil pour deux présidents qui était soutenu par Paris, n’a pas fonctionné non plus.
Des lobbies français infiltrés au sein du mouvement populaire du 22 Février ont alors tenté de pousser celui-ci à la violence afin de provoquer des affrontements avec l’armée qui sera fustigée à travers des slogans comme « Etat civil et pas militaire » ou encore « les généraux à la poubelle ». Mais ce scénario du « chaos » ou « printemps arabe », a aussi capoté grâce à la vigilance et la maturité du peuple algérien qui est resté pacifique et dénonçait toute ingérence qu’elle vienne de l’Occident (France USA) ou de l’Orient (Emirats arabes Unis, Qatar, Arabie Saoudite) que Bouteflika avait ramené de son exil doré aux EAU.
Cette nouvelle tentative à travers le Parlement européen, confirme bien que les plans de l’Hexagone n’ont pas fonctionné et que l’Algérie n’est plus la chasse gardée de la France depuis la chute de Bouteflika. Le nouveau Pouvoir n’est pas dans les bonnes grâces de Paris, probablement pour avoir refusé d’accéder à des certaines demandes de l’Elysée en matière économique et sécuritaire, en faisant prévaloir les intérêts nationaux de l’Algérie. Car c’est connu quand un gouvernement défend les intérêts de son pays et non ceux de la France-Afrique, Paris fait tout pour le renverser comme on le voit dans la plupart des pays d’Afrique. C’est la guerre coloniale qui se poursuit sous d’autres formes.
La démocratie ne s’exporte pas. Ceux parmi les Algériens qui pensent que les français qui luttent en ce moment pour leurs propres libertés, ou les américains (en ce moment en prise avec leur démocratie éclaboussée par les accusations de fraude électorale) peuvent leur donner la recette miracle pour construire un système politique démocratique, se trompent. C’est avant tout un système qui doit être pensé et mis en pratique par les Algériens et pour les Algériens, en partant de leur propre expérience.
Les Algériens qui approuvent cette « démocratie importée » sans doute parmi les jeunes influencés par les médias et les réseaux sociaux pensant sans doute que cela leur permettra de bénéficier de tous les bienfaits du monde moderne ici et maintenant, devraient poser la question aux jeunes des pays qui ont applaudi à « La démocratie exportée » comme la Lybie voisine, la Syrie, le Yémen pour savoir ce qu’ils en pensent. Une dizaine d’année après « le Printemps arabe » de 2011, censé libérer les peuples de leurs autocrates et faire respecter la liberté et les droits de l’Homme, c’est toujours la guerre ou des conflits larvés. La démocratie n’est pas une marchandise qui s’exporte comme une usine clef en main ou un costume prêt à porter.
Ces jeunes algériens savent-ils que les amazighs ont inventé la démocratie bien avant les européens. « Tajmaath », cette démocratie villageoise, « directe », « républicaine » dans les villages kabyles, alors inconnue en Europe, a suscité l’intérêt des chercheurs et observateurs français et européens, dont le célèbre Karl Marx. Celui-ci décrit cette organisation villageoise, comme « un exemple concret du socialisme » de ses rêves. C’est ce qu’il écrit dans ses « Lettres d'Alger et de la Côte d'Azur » rédigées en 1882, suite à son voyage à Alger (du 20 février au 2 mai). Il devait se rendre en Kabylie pour étudier cette organisation qui remonte au 18ème siècle, mais la maladie l’en empêcha.
Ces jeunes algériens qui confondent « solidarité des peuples» et ingérence étrangère ont t-il remarqué le caractère méprisant et donneur de leçons aux « indigènes » que nous restons à leurs yeux, par ces députés et surtout le caractère sournois et diviseur de leur texte en parlant « d’ethnies » et de « minorités » opprimées, pour s’attaquer à la cohésion nationale, ce qui montre bien leur mauvaise intention. Ces députés oublient que la nation algérienne a été unifiée depuis plusieurs siècles et soudée par le sang versé par le peuple algérien sur tout le territoire national, pour se libérer de la colonisation française.
La démocratie n’est pas une construction ex nihilo, elle prend racine dans les luttes de chaque peuple, dans son histoire, son économie, sa culture. Les peuples européens ont mis des siècles pour construire leur système démocratique et aujourd’hui ils sont eux-mêmes en lutte pour défendre leur souveraineté nationale contre la « machine bureaucratique » de Bruxelles où nombre de députés ont oublié les intérêts des travailleurs et de leurs concitoyens pour se transformer en défenseurs des multinationales et des super milliardaires du Capitalisme financier mondial partisans d’un « Nouvel ordre mondial ».
Ce nouvel ordre mondial signifie la fin des Etats –nations, que l’on cherche à détruire au moyen des opérations de type « Printemps arabe », la fin de la souveraineté nationale pour chaque pays, la disparition des frontières, la fin des Gouvernements nationaux et leur remplacement par un Gouvernement mondial –qui ne sera pas élu démocratiquement mais désigné par les plus riches alors adieu la démocratie et la liberté pour toujours!
A Paris des milliers de manifestants se sont insurgés et réprimés Place de la Bastille pour rejeter le projet de loi contre « la sécurité globale » de Macron. Et que fait le Parlement européen pour défendre ces citoyens ? Il s’occupe de l’Algérie !
Cependant il faut remarquer, par un curieux hasard, que ce nouvel épisode de l’ingérence européenne dans les affaires internes algériennes intervient dans un contexte régional explosif à la frontière Ouest du pays avec la guerre qui a éclaté entre la RASD et le Maroc, peu de temps après l’apparition d’un nouvel acteur dans cette région, les Emirats arabes unis (EAU), qui ont installé un consulat à El- Ayoun (Sahara occidental occupé).
Pourquoi un tel consulat dans un territoire occupé où il n’y a aucun ressortissant de ce pays qui pourrait justifier une présence diplomatique ? Ce geste, qui n’a pas pu se faire sans l’aval de Paris et d’Israël, tous deux très influents au Maroc a été interprété par les observateurs comme une manœuvre ciblant l’Algérie qui avait critiqué la normalisation des relations entre certaines monarchies du Golfe, dont les EAU, avec Israël.
Que cherche l’axe France- Israël-EAU dans cette région de l’Afrique du Nord ? Maintenir la stratégie de la tension pour réaliser un autre « Printemps arabe » comme celui qui a détruit la Lybie et déstabilisé la Tunisie avec l’aide des partis islamistes? Provoquer l’Algérie pour l’amener à entrer dans une guerre avec le Maroc alors qu’il s’agit d’un conflit entre ce dernier et la RASD ?
Couper l’herbe sous les pieds du Président Abdelmadjid Tebboune qui avait appelé à un rapprochement entre Alger et Rabat, en déclarant que « l’Algérie n’avait pas de problème avec le Maroc. Et si c’est le cas qu’ils viennent le poser ». La cause du Sahara occidental, est une question de décolonisation posée au niveau de l’ONU», solution que le roi Hassan II avait approuvée en 1989.
Le peuple sahraoui qui a patienté depuis 1991 a décidé de reprendre les armes après l’attaque marocaine rompant le cessez –le feu à El-Guerguerat, mais ce n’est pas de gaité de cœur, comme l’ont déclaré ses dirigeants, mais pour défendre ses droits reconnus internationalement. Cela fait plusieurs années d’ailleurs que le Polisario avait menacé de reprendre la guerre en raison du statut quo maintenu par le Maroc et l’inertie de l’ONU. C’est une injustice que les partisans de la paix doivent réparer sans plus tarder.
Une guerre algéro -marocaine n’est pas dans l’intérêt des deux peuples unis par des liens familiaux et historiques. Ils ne doivent pas céder aux provocations. Il faut convoquer la sagesse et la raison, laisser la diplomatie faire son travail, pour éloigner le spectre d’une guerre fratricide dont ne tireront profit que les anciens et nouveaux colonisateurs de l’Afrique et leurs zélés serviteurs.
Houria Ait Kaci
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