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♦ À la croisée des chemins et des destins
Si tous les chemins mènent à Rome, tous les chemins ne mènent pas à Jérusalem !
Bien que la Syrie et le Liban, pour ne citer qu’eux, aient un destin commun inéluctable, les déviations de l’un ou l’autre ne peuvent que l’éloigner voire le manquer ou encore le subdiviser !
Je ne commenterais pas pour la énième fois le comment du pourquoi de la guerre criminelle engagée de manière unilatérale contre la Syrie par le sionisme mondial, auquel ce sont greffés les petits intérêts des opportunistes et arrivistes parsemés dans ce Levant antique qui, malgré sa longue expérience tout au long de cinq millénaires, n’arrive pas à se débarrasser de ses maux récurrents jalousement sauvegardés par quelques brebis galeuses où germent trahisons, soumissions, mensonges, intrigues, individualisme au dépend de l’intérêt collectif … pourtant certains autres n’économisent pas leurs efforts pour qu’il en soit autrement, ne lésignent pas sur les sacrifices nécessaires pour y parvenir, et rien ni aucune agression ni mépris ne les dévient de leur détermination à rester sur le droit chemin, celui qui mène au destin tant attendu : un Levant à l’âme saine seule garante de sa liberté, de sa stabilité et son épanouissement d’autant plus que nous possédons tous les ingrédients nécessaires pour y parvenir !
Dès lors quel pourrait être le remède pour qu’enfin ce Levant puisse guérir de ses maux séculaires ?
Certains optent pour la facilité, pour le chemin où l’on se contente de sauver les apparences superficielles sans s’attaquer au mal en profondeur une bonne fois pour toutes. D’autres, veulent éradiquer le mal à la racine et donc empruntent un chemin difficile semer d’embûches où le sacrifice est indispensable, où la douleur est nécessaire et ou l’effort doit être continu jusqu’à la délivrance ! En somme, c’est la renaissance du Levant qui est le véritable enjeu, or y-a-il de naissance sans douleur ?
Il serait temps que notre civilisation si vantée, à juste titre, puisse enfin accoucher après des siècles de remous violents et cycliques d’un nouveau Levant où chaque levantin serait fier d’appartenir à une Nation, au sens vrai du terme, renaissance pour entrevoir un avenir serein et en terminer avec ce cycle de violence qui perdure depuis trop longtemps !La question est primordiale, vitale mais aussi épineuse. Épineuse car la réponse demande l’adhésion de tous et le consentement de tous pour opter sans retour, et sans détour, pour le chemin de la délivrance et non pas celui où connivence et complaisance qui cultivent le mal et qui nous empêche de vivre tout simplement ! N’est-ce pas la Via Dolorosa qui aboutit à la délivrance ?
Le dernier discours de Nasrallah du 11 novembre dernier, attendu après les événements troublants qui ont eu lieu à Damas la veille, m’a laissé avec une impression mitigée. Si notre Sayyed s’est montré, comme à son habitude, rassurants sur les objectifs de la résistance, sur sa détermination et sur son choix irréversible pour le chemin de la délivrance quelques soient les sacrifices qu’il impose, il s’est par contre montré plus vague sur la nouvelle fraternité, subite, entre le président syrien, son binôme et son frère d’armes dans la guerre contre le sionisme, et les hordes en cols blancs venus de la péninsule arabique, hordes déguisés en sauveurs, ces même hordes qui ont œuvré tout au long d’une décennie à détruire la Syrie et qui plus est continuent à l’heure qu’il est sans le moindre scrupule !
La contradiction est de taille, elle raconte d’elle même les coulisses de ce nouveau idylle entre l’idole d’un peuple, en l’occurrence Assad, et les monarchies de l’obscurantisme et de la soumission au sionisme ! Elle raconte une dichotomie maladive, une hésitation qui se mue en soumission et une soumission qui elle même risquera de se muer en trahison !
Ainsi vont les faiblesses des uns et des autres, elles adoucissent les plaies un moment mais en même temps elles approfondissent les blessures !
Il me semble que beaucoup perdent de vue que l’objectif ultime de la résistance est la libération de la Palestine !
L’AAS et le Hezbollah épaulés par la Russie et l’Iran ne se battaient-ils pas en Syrie que pour contrer les sionisme défendu par L’OTAN et les pays du Golfe Persique créateurs, parrains et trésoriers du terrorisme mondial.
Le Chemin de Jérusalem passe par Alep, par Ghoutta, Palmyre, Homs, Hama …passera par Idlib… mais aussi, comme je n’ai cessé de le répéter depuis dix ans, par Riyadh !
Or où nous en sommes de ce combat qui devait dans un premier temps se débarrasser des amis et valets d’Israël qui ont germé dans nos pays puis, dans un deuxième temps, se concentrer sur la Palestine ?
« L’EAU dans le gaz » et limiter les dégâts
Un discours d’une heure de celui qui demeure le guide premier de tout résistant dans le Monde Arabe islamo-chrétien, abordant les sujets habituels, leur évolution et sa propre position sur chacun d’eux sauf sur un seul sujet qu’il a abordé en début du discours de manière très brève, évasive et conforme à 100% , pour une fois, mot par mot à la position iranienne exprimée la veille: « l’ouverture des pays du Golfe est une preuve de la victoire de la Syrie » ! Il n’a pas jugé, tout comme les iraniens, ni de la forme ni du fond ni du contenu de la rencontre à Damas entre le président syrien et le ministre des AE des EAU aux allures fraternelles comme si rien n’a jamais été depuis bientôt onze années d’une violence inouïe !
En l’écoutant, moi qui a l’habitude de l’écouter, j’ai lu dans ses yeux au moment de prononcer cette phrase, cette interprétation m’est personnelle, « l’ouverture des pays du Golfe est preuve de NOTRE victoire » ! Sa modestie, son amitié, comme nous tous, et pour cause formons un seul peuple, pour les syriens et aussi sa volonté de colmater la brèche l’empêchaient de dire autre chose que « la victoire de la Syrie » !
« Victoire » prend ici une lourde signification: « puisque nous avons gagné sur le terrain les pays du Golfe persique attaquent la Syrie sous une autre forme et avec d’autres armes », moins violentes certes mais plus vicieuses !
Or, l’ouverture des monarchies scélérates du Golfe sur la Syrie est une chose, et la manière dont la Syrie, ou tout autre membre de l’axe de la résistance, de l’accueillir c’en est une autre !
En tout état de cause Nasrallah nous laisse sur notre faim, on aurait aimé entendre son avis sur le contenu de la rencontre entre le ministre des AE des EAU et le président syrien, les contacts signés contre toute attente et cela sans aucune contre-partie politique réelle, pas une seule déclaration concernant les troupes des soldats occidentaux alliés des EAU encore présents sur le territoire syrien, ni sur la partie occupée par les turcs, ni même sur le terrorisme !
Le ministre des AE s’est contenté d’une déclaration vide de sens : « nous sommes pour la stabilité en Syrie », il ne manquerait plus qu’il vienne à Damas déclarer « nous sommes pour l’instabilité en Syrie »!
Les EAU, ni aucun pays du Golfe persique pas plus que les pays membres de l’OTAN n’ont rien à faire en Syrie sinon venir dédommager le peuple syrien ! Puis une remarque: s’était trop s’abaisser pour l’Emir qui gouverne les EAU de se déplacer lui-même au lieu d’envoyer un émissaire fusse-t-il ministre ?
Ce que je retiens de cette visite est un mépris totale du bourreau pour sa victime, ce qui est conforme à la mentalité des bédouins du Golfe, cela ne me surprend pas !
Ce qui me surprend, et me choque, est l’attitude d’Assad, indigne, soumis et en totale contradiction avec la solidité et l’intransigeance justifiée dont il a fait preuve depuis plus de dix ans !
N’est-ce pas son intransigeance qui a aussi contribué à la survie de l’Etat syrien ? Et voilà qu’il confie, de manière pour le moins brusque et troublante, une partie du destin de la Syrie à ceux-la même qui hier s’acharnaient encore contre lui et contre son peuple et qui continuent aujourd’hui !
Si ce n’est pas une trahison c’est une grossière erreur à la portée stratégique fort regrettable d’autant plus qu’Idlib qui devait être facilement libérée il y a deux ans, aux dires même d’Assad, ne l’est toujours pas ! Mystère !
Dès lors trois questions s’imposent :
- Est-ce qu’Idlib fait partie d’un marchandage absurde ? Une manne financière contre la ville ? Et ainsi pérenniser Al-Nosra dans un semblant d’Etat au Nord-Ouest de la Syrie ainsi qu’un autre Kurde au Nord et au Nord-Est ?
- Qu’en est-il de la libération du Golan et de la Palestine ? Assad prend-il à son tour le chemin de la normalisation avec l’État sioniste ?
- La Russie avait-elle joué un rôle ou pas dans ce spectacle affligeant ? Si non quel est l’avenir des bases russes en Syrie ? Si oui que dira l’Iran qui est intransigeant concernant la Palestine !
Je suis tenté de répondre par l’affirmative aux deux premières questions ! D’ailleurs les manœuvres militaires dans la mer rouge avec la participation d’Israel, des USA, du Bahrein et des EAU le lendemain de la déclaration de fraternité entre Assad et Al-Nahyane n’ont pas vocation à rassurer !
Concernant la troisième question, tout est possible d’autant plus que le silence de la diplomatie russe ressemble à un « quitte ou double » et dans les deux sens ! Au pire, le marchandage que j’ai évoqué plus haut engloberait-il un statut-co au Donbass et un autre au Nord de la Syrie ?
L’avenir nous le dira !
L’Arabie Saoudite et l’Iran
Pour le reste, hormis sauver les apparences pour ce qui s’apparente à une abdication d’Assad devant les pétrodollars pourtant de plus en plus rares, Nasrallah n’a pas manqué de rappeler la puissance du Hezbollah et de l’Iran et la fragilité de l’entité sioniste malgré ses gesticulations (manœuvres militaires, bombardements sans effets sur la Syrie…) puis il a aussi salué l’héroïque peuple du Yemen dont il entérine la victoire sur la coalition occidentalo-bédouine !
Par contre il a pris le temps d’expliquer ce qu’il en est de la rencontre des iraniens et des saoudiens à Baghdad.
Tout d’abord il ne s’agissait en aucun cas de négociations entre les deux pays et le Hezbollah, confirme Nasrallah, n’en était pas concerné ni de près ni de loin comme certains médias l’avaient rapporté ! La réalité est, toujours selon Nasrallah, les saoudiens ont sollicité cette réunion pour demander aux iraniens d’arranger un cessez-le-feu avec les yéménites, la réponse des iraniens à été la suivante: « nous ne représentons pas le Yémen qui a ses propres représentants, allez donc les voir et négociez avec eux »!
Je crois que c’est assez clair !
Une autre affirmation de Nasrallah, qui a insisté à juste titre sur la fraternité entre le peuple syrien et le peuple de la résistance libanaise, je le cite: « l’Arabie Saoudite et ses satellites des autres pays du Golfe persique SONT le terrorisme »!
A bon entendeur !
Un autre sujet abordé par Nasrallah, la situation politique explosive au Liban. Je consacrerai prochainement à ce sujet un autre article.
L’ombre de Souleimani
C’est dans des pareilles circonstances que la perte de Souleimani se ressent terriblement ! Contrairement à ce qu’on a écrit par ci par là, il ne s’était pas occupé du front militaire de manière directe. Son rôle était éminemment politique et stratégique, c’est lui qui était le liant entre tous les partenaires de la résistance au sionisme ! Ses navettes incessantes entre les pays de l’axe de la résistance arabe avaient porté leurs fruits, d’où son assassinat fièrement revendiqué par le terroriste Trump !
Mieux qu’assurer la cohésion entre les résistants d’Irak, du Yémen, du Liban et de Syrie, il a aussi, et c’est sa réussite majeure, éloigné la résistance palestinienne de la sphère des frères musulmans, engeance du wahhabisme, pour, d’abord les unifier, ensuite pour les rapprocher du Hezbollah jusqu’à en devenir des partenaires à part entières, les derniers combats en Palestine au printemps dernier en sont la preuve absolue et par les faits et par les déclarations de part et d’autres !
Il me paraît évident qu’une fraternité entre le Hezbollah et la résistance palestinienne est bien plus glorieuse qu’une fraternité entre Assad et les émirs de la péninsule arabique !
À la croisée de tous les dangers
Enfin, cela va sans dire, qu’autant lors des dix dernière années le couple Assad et Nasrallah semblait solide, malgré des toutes petites fissures apparues lors des deux dernières années, autant cette fois-ci, il ne s’agit pas de petite fissure mais de faille !
Certains pourront toujours essayer de le nier par un raisonnement aussi irrationnel que l’absurde rapprochement soudain et incongru entre le pouvoir syrien du moment et les monarchies criminelles du Golfe qui ne cachent plus leur soumission à Israël, il n’en demeure pas moins que ce développement géopolitique par excellence ressemble plus à une croisée des destins qu’à des simples chemins !
Pour moi, même si en haut lieu on ne l’avoue pas pour l’instant, le divorce est consommé ce qui est fort dommageable pour tout le monde sauf pour nos ennemis qui en tirent déjà un bénéfice politique conséquent avec à leur tête le sionisme mondial !
En réalité il s’agit d’une ouverture intéressée d’Assad sur les pays du Golfe et non pas le contraire ! Une ouverture qui redonne la main au consortium du crime OTAN-Israel alors qu’ils avaient un genou à terre car épuisés par des multiples défaites en Syrie, en Irak et au Yémen, d’où mes craintes exprimés plus haut !
C’est d’autant plus mal venu que l’Iran prouve jour après jour sa totale supériorité dans les eaux du Golfe persique, comme le prouve l’épisode du tanker de la semaine dernière, et par conséquent l’impuissance de l’armada américaine !
Toutefois, nous autres qui formons le peuple de la résistance, nous soutenons toujours et de manière inconditionnel l’armée arabe syrienne et les honnêtes, les justes et les fidèles à nos causes sacrées qui demeurent majoritaires au sein du peuple syrien, j’en suis convaincu !
Gloire à nos martyrs du Levant.
Soumis par Hayan Sidaoui http://www.hayansidaoui.net/index.php/à-la-croisée-des-chemins?
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